Le bleu et Jacques Monory

Entre faits divers et camaïeu de bleus, la Fondation Maeght célèbre les peintures de Jacques Monory

Disparu le 17 octobre 2018, ce peintre a su marquer par un style affirmé, et par sa signature visuelle, l’art de son époque.

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(Publié le 18 juillet 2020 à 09h00 – LE MONDE)

 

Usage de la monochromie, souvent réduite à un camaïeu de bleus ou de roses, froideur de la touche et de la composition, mise à distance du monde et ses incohérences, recours aux grands formats, représentation de paysages urbains ou de grandes étendues de nature… Principal représentant de la figuration narrative dans les années 1960 en France, Jacques Monory (1924 -2018), qui fait l’objet d’une exposition à la Fondation Maeght à Saint-Paul-de Vence jusqu’au 22 novembre, s’est toujours inspiré des faits divers et de la violence qui en émane.

« Le fait divers rend compte d’un quotidien qui comporte deux significations : celle de l’histoire du monde et une autre purement subjective, confie Laurence d’Ist, commissaire de l’exposition. Ainsi, pour symboliser l’existence humaine, Monory agrandit un fait de tous les jours de sorte à lui donner un sens éternel et universellement valable. Monory partage les images de désespoir trouvées chez les autres pour lui permettre d’entretenir un rapport profond avec la société. »

Ses toiles révèlent des ambiances dramatiques et pesantes dont les personnages, au destin le plus souvent tragique, racontent des histoires proches de celles projetées dans les salles obscures. Un récit séquentiel où la mise en scène – figée sur la toile – donne l’illusion du mouvement : « Jacques Monory compose ses peintures à partir de photographies. Une photographie tirée du 7e art ou des médias ne l’intéresse que si son sujet a une relation étroite avec sa propre vie. Ensuite, il compose sur un grand carnet le montage de la peinture à venir. Il y concentre son sujet et la scène en une seule composition. Il réalise un arrêt sur image symbolique, condensé pour que le film soit là tout entier sur la toile. Sa peinture dit une histoire de manière exemplaire sans la raconter en entier : elle est nourrie de philosophie stoïcienne. “La peinture est d’emblée la réflexion et le cinéma la sensation”, disait-il. »